DORA : Une révolution réglementaire pour la résilience numérique du secteur financier

10 juin 2025 Tech

DORA : Une révolution réglementaire pour la résilience numérique du secteur financier

À l’heure où les cybermenaces ne cessent de croître, la continuité des services financiers repose sur la capacité des acteurs à anticiper, absorber et surmonter les perturbations numériques. Un incident affectant une seule entité peut suffire à désorganiser l’ensemble du marché. C’est dans ce contexte qu’intervient DORA (Digital Operational Resilience Act), le nouveau règlement européen sur la résilience opérationnelle numérique. En imposant des standards rigoureux à l’ensemble de la chaîne financière, il vise à structurer une réponse collective face à un risque devenu systémique.

 

Le contexte du règlement DORA

Selon l’OCDE, le secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) regroupe l’ensemble des entreprises qui conçoivent, commercialisent ou fournissent des services liés aux outils permettant de capter, transmettre ou représenter des données électroniques. La numérisation croissante de l’économie a profondément transformé les modes de fonctionnement, notamment dans le secteur financier, largement tributaire de ces réseaux et systèmes d’information.

Les opérations quotidiennes des entités financières (paiements, compensation et règlement de titres, trading électronique et algorithmique, opérations de prêt, financement participatif, notation de crédit, gestion de créances et post-marché) s’appuient aujourd’hui sur des infrastructures numériques. Le secteur des assurances a lui aussi évolué, avec l’émergence d’intermédiaires en ligne, d’acteurs InsurTech et de solutions numériques de souscription. Ainsi, la transition numérique du secteur financier ne s’est pas limitée à une digitalisation des services : elle a également intensifié les interdépendances entre les institutions financières et leurs prestataires technologiques tiers, accentuant la vulnérabilité du système dans son ensemble.

Dans un environnement financier profondément remodelé par l’intégration massive des technologies numériques et marqué par une dépendance accrue à des prestataires extérieurs, les menaces informatiques se sont intensifiées, rendant les acteurs du secteur particulièrement exposés aux incidents opérationnels. C’est dans ce contexte de fragilisation croissante que s’inscrit le règlement DORA, entré en vigueur le 17 janvier 2025, qui s’impose dès lors comme un pilier essentiel de la sécurité numérique pour le secteur financier européen.

Face à l’accélération de la digitalisation des services, ce texte trace une feuille de route claire et ambitieuse afin de renforcer la résilience face aux cybermenaces tout en protégeant davantage les données clients. La conformité au règlement DORA représente donc un enjeu crucial pour les institutions financières ainsi que pour leurs sous-traitants spécialisés dans les technologies de l’information et de la communication (TIC), qui doivent impérativement anticiper ses conséquences tant sur le plan opérationnel que stratégique.

 

 

Une réponse réglementaire à une menace croissante

La cybersécurité s’impose aujourd’hui comme le défi majeur des banques européennes, puisque 82 % des directeurs des risques la considèrent comme la menace la plus préoccupante. En conséquence, DORA marque une étape clé en harmonisant les régulations existantes et en instaurant un cadre unifié pour gérer les risques liés aux TIC. Ce cadre englobe toute menace susceptible de compromettre la sécurité des réseaux, outils technologiques et processus, et donc d’entraîner des conséquences négatives dans les environnements numériques ou physiques.

Le secteur financier est particulièrement exposé aux cyberattaques, en raison des volumes considérables de données sensibles et de transactions qu’il manipule quotidiennement. Ces caractéristiques en font une cible de choix pour les cybercriminels. Au-delà des incidents isolés, les menaces cybernétiques font peser un risque systémique sur l’ensemble du secteur. L’interconnexion étroite entre institutions financières, infrastructures de marché, chambres de compensation et prestataires technologiques crée un environnement où une attaque ciblée peut rapidement se propager, sans entrave géographique, et affecter la stabilité financière globale.

Une cyberattaque dirigée contre un acteur d’importance systémique, comme une banque centrale, une chambre de compensation ou un prestataire critique, peut entraîner des perturbations en cascade :

  • Interruptions de services bancaires
  • Indisponibilité des comptes ou plateformes
  • Vols de fonds ou de données

Elle peut aussi provoquer une crise de liquidité, en paralysant la capacité des institutions à honorer leurs engagements, ou déclencher une perte de confiance massive, conduisant à des retraits bancaires massifs et à une chute brutale des valorisations boursières.

Face à ces menaces, qui peuvent désorganiser les marchés et semer la panique économique, le règlement DORA fournit un cadre juridique harmonisé pour renforcer la résilience numérique du secteur financier européen, prévenir les effets domino et protéger la stabilité du système dans son ensemble.

 

Un objectif principal : sécuriser les données et prévenir les interruptions

Le règlement vise avant tout à préserver les données sensibles, qui sont au cœur des activités financières manipulant un volume important d’informations personnelles et financières. De plus, il entend prévenir les interruptions de service résultant de cyberattaques ou de pannes technologiques susceptibles de paralyser les opérations. Par ailleurs, DORA impose des normes strictes de cybersécurité aux prestataires tiers, dans le but de limiter les risques systémiques menaçant la stabilité de l’ensemble du système financier.

L’objectif de DORA est de garantir que toutes les entités financières européennes soient capables de résister, de répondre et de se remettre efficacement de ces incidents. Plus précisément, le règlement vise à renforcer la résilience opérationnelle des entités financières, qu’il définit comme la capacité à sécuriser les systèmes d’information, qu’ils soient gérés en interne ou par des prestataires tiers, afin de maintenir la continuité et la qualité des services, même en cas de perturbations.

 

Un champ d’application très large

Le règlement s’applique à toutes les institutions financières de l’Union européenne, sans distinction de taille ou de complexité. Ainsi, il couvre un large spectre d’acteurs :

  • Banques
  • Compagnies d’assurance
  • Etablissements de crédit
  • Prestataires de services de cryptoactifs
  • Plateformes de négociation
  • Entreprises d’investissement et sociétés de gestion
  • Fournisseurs de services TIC

 

Trois axes stratégiques et cinq piliers réglementaires

 

Le règlement DORA repose sur trois axes majeurs :

  • La gestion des risques informatiques
  • La continuité des activités en cas de perturbations
  • La supervision par les autorités compétentes

En outre, le règlement s’appuie également sur cinq piliers fondamentaux :

  • La gestion des risques informatiques
  • La gestion et notification des incidents
  • Les tests de résilience opérationnelle numérique
  • La gestion des risques liés aux prestataires TIC
  • Le partage d’informations sur les cybermenaces

 

Une gestion des risques TIC à renforcer

Dans ce cadre, les entreprises financières doivent établir un dispositif solide de gestion des risques TIC. Cela implique notamment :

  • D’identifier les systèmes critiques, indispensables à la continuité des activités et à la conformité,
  • D’assurer une surveillance constante des ressources numériques,
  • De mettre en place des mécanismes de détection d’anomalies, ainsi qu’une stratégie de sauvegarde et de reprise afin de limiter les interruptions.

 

Une obligation de notification en cas d’incident

DORA impose également l’identification et la classification des incidents TIC selon leur gravité, de même que la notification des incidents majeurs aux autorités compétentes, notamment à l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) en France. Un incident majeur correspond à un événement inattendu compromettant la sécurité des systèmes d’information et pouvant entraîner des conséquences graves, telles qu’une détérioration de la performance financière, une interruption dans la prestation du service ou un manquement réglementaire.

Ces échanges d’informations visent à permettre aux entités financières de bénéficier rapidement d’un appui technique pertinent, de recommandations concrètes sur les mesures correctives à adopter, ainsi que d’un suivi adapté de la part des autorités compétentes. La circulation des données relatives aux incidents majeurs liés aux TIC doit être bidirectionnelle : les autorités de supervision doivent fournir des retours et des orientations utiles, tandis que les entités financières ont vocation à transmettre des informations anonymisées sur les cybermenaces et les vulnérabilités constatées. Cette approche collaborative contribue ainsi à renforcer la défense collective du secteur.

 

Des tests annuels obligatoires de résilience

Le règlement prévoit aussi des tests annuels de résilience des systèmes, visant à évaluer leur robustesse face aux cybermenaces. Pour ce faire, les systèmes critiques doivent faire l’objet de tests conduits par des entités indépendantes, assurant ainsi une évaluation rigoureuse et impartiale. L’objectif de cette simulation est d’évaluer la solidité et la pertinence des systèmes face à des cyberattaques sophistiquées.

 

Des sanctions adaptées à chaque situation

La sanction relève de l’appréciation des États membres et de leurs autorités compétentes, qui peuvent adopter des mesures financières ou disciplinaires afin d’assurer le respect des obligations légales des entités financières. À ce titre, ces autorités disposent de pouvoirs étendus, incluant des sanctions administratives, des avertissements publics, des plans de remédiation et, le cas échéant, le retrait de l’agrément.

Concernant les prestataires critiques de services TIC, les autorités peuvent mener des contrôles et appliquer des sanctions en cas de non-conformité, telles que des pénalités financières et des astreintes journalières pouvant atteindre 1 % du chiffre d’affaires mondial du prestataire, pour une durée maximale de six mois.

Face à une menace numérique croissante, DORA représente bien plus qu’un cadre technique : ce règlement incarne une exigence de responsabilité collective au service de la stabilité financière européenne. Ce règlement invite chaque acteur du secteur à repenser ses pratiques, à renforcer ses défenses et à coopérer plus étroitement. La conformité, bien qu’ambitieuse, constitue une opportunité stratégique de renforcer la confiance dans l’écosystème numérique. Anticiper, s’adapter et collaborer : telles sont les clés d’une résilience durable. L’avenir de la finance européenne se construira autant sur la robustesse technologique que sur la vigilance partagée.

 

Conclusion

DORA ne se résume pas à une nouvelle obligation réglementaire : il marque une évolution culturelle dans la gestion des risques numériques. Il impose de passer d’une logique défensive à une approche proactive, ancrée dans la coopération et la transparence. Se préparer à DORA, c’est renforcer sa robustesse, rassurer ses partenaires et s’inscrire dans une finance durable. C’est aussi démontrer que la confiance, aujourd’hui, se construit autant par la cybersécurité que par la résilience. En somme, anticiper DORA, c’est investir dans la pérennité de son activité.

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